Perspectives du secteur des véhicules récréatifs pour l’Amérique du Nord

Les consommateurs nord-américains aiment toujours autant le camping. La participation à des activités extérieures était déjà en hausse, mais la pandémie a considérablement accéléré les tendances en matière de véhicules récréatifs (VR). La croissance du nombre de ménages qui font du camping s’est accélérée pendant la pandémie et est demeurée élevée par rapport aux niveaux d’avant la pandémie. Dans l’ensemble, c’est une excellente nouvelle pour le secteur des VR.

J’ai récemment animé une discussion avec Tristan Thomas-Martin, analyste, Loisirs, BMO Marchés des capitaux. Il a fait part de ses observations et de ses points de vue sur les tendances du marché nord-américain des VR, y compris les principales tendances qui guideront le secteur en 2024. Voici un résumé de notre entretien.

Comme l’a expliqué M. Thomas-Martin, le secteur des VR a connu une évolution en dents de scie lorsqu’il s’est agi de trouver un équilibre entre l’offre et la demande. « L’année 2017 a été une période où le secteur a commencé à surcharger le canal, suivie d’une rupture de stock en 2018 et en 2019, dit-il. Nous étions encore en train de travailler sur les ruptures de stock lorsque la pandémie est survenue, et la demande est montée en flèche. »

Faisant remarquer que le secteur des VR peut rapidement augmenter ou diminuer sa production en fonction des conditions, M. Thomas-Martin a souligné qu’après l’augmentation initiale de la demande liée à la pandémie, le secteur a relancé sa production pour rattraper la demande. La production mensuelle a culminé à environ 700 000 unités par année en 2021. Bien que cela ait fini par entraîner un autre déséquilibre entre l’offre et la demande, M. Thomas-Martin prévoit que les conditions se normaliseront.

« Comme c’est souvent le cas, l’histoire se répète, et le secteur a répété les erreurs de 2017 et a dépassé la demande de détail lorsque celle-ci a décéléré en 2022 et 2023, dit-il. Je m’attends à ce que le commerce de détail se stabilise en 2024 avant un retour à la croissance en 2025. »

Le fait que le secteur ait pris des mesures pour redéfinir les prix est l’une des raisons pour lesquelles M. Thomas-Martin croit que les conditions s’amélioreront en 2025. « Les prix de détail suggérés par le fabricant (PDSF) pour les VR pouvant être remorqués font l’objet d’une baisse à deux chiffres, certaines marques affichant une baisse de 20 % à 25 % pour l’année modèle 2024 par rapport à l’année 2023. Par ailleurs, les équipementiers ont modifié leurs gammes de produits et introduit de nouveaux modèles moins coûteux pour essayer de mobiliser de nouveau l’acheteur débutant. »

Ces tendances en matière de prix et d’offre s’étendent également aux véhicules récréatifs d’occasion. Une autre conséquence de la pandémie, a souligné M. Thomas-Martin, a été une hausse du prix des VR d’occasion. Avant la pandémie, il était normal que les prix diminuent d’un mois à l’autre. Toutefois, pendant la pandémie, la demande a bondi à mesure que de plus en plus de gens exploraient le mode de vie lié aux VR, et les véhicules d’occasion étaient considérés comme une solution de rechange moins coûteuse.

« Nous avons constaté que les prix des VR d’occasion ont augmenté et sont allés à l’encontre de la tendance normale, atteignant un sommet d’environ 75 % du PDSF pour les VR neufs, a déclaré M. Thomas-Martin. Ce que nous avons vu depuis ce sommet, c’est que les choses sont revenues à une saisonnalité normale. Il s’agit maintenant d’environ 52 % du PDSF pour les VR neufs, ce qui est beaucoup plus conforme à ce que cela devrait être. »

À l’heure actuelle, selon M. Thomas-Martin, rien ne laisse croire que les consommateurs en ont assez du mode de vie lié aux VR, ce qui devrait être de bon augure pour le secteur. Après une diminution substantielle des stocks de véhicules d’occasion pendant la pandémie en raison de la forte demande, les conditions se sont stabilisées depuis le début de 2022. « Le fait que nous n’observions pas un afflux massif de personnes revenant pour échanger leur VR et délaissant ce mode de vie est un signe très positif », a déclaré M. Thomas-Martin.

Ces tendances en matière de tarification aident également le segment des VR à surpasser les autres segments récréatifs. « La raison pour laquelle nous avons vu les ventes au détail de VR surpasser certains des autres segments que je couvre, tels que les bateaux ou les véhicules tout-terrain, est que ce secteur a été le plus agressif dans la redéfinition des prix, puis dans la mobilisation de l’acheteur à paiement mensuel », a déclaré M. Thomas-Martin.

Selon M. Thomas-Martin, un des segments qui connaît encore des difficultés est celui des véhicules construits à partir d’un châssis motorisé, en particulier les autocaravanes de classe B et de classe C. « Ce sont des modèles en demande. Plus récemment, la grève de l’United Auto Workers (UAW) a eu une incidence sur Ford Transit et Dodge Ram ProMaster, de sorte que le prix de certaines de ces unités augmente. C’est la plus grande difficulté du point de vue de la chaîne d’approvisionnement dans le secteur des VR. »

Bien entendu, les taux d’intérêt demeurent un sujet important dans le secteur. Bien que M. Thomas-Martin ait souligné que les taux de détail ont commencé à se stabiliser un peu, les taux de gros continuent d’être élevés. Cela a fait en sorte que les concessionnaires ont repensé ou retardé leurs plans d’achat pour 2024, ce qui s’est traduit par des commandes allégées depuis le début de l’année.

« Je crois que les concessionnaires ont hésité à commander, a déclaré M. Thomas-Martin. Ils ne veulent pas accumuler de stocks. Ils savent que les fabricants ont encore des unités disponibles, et ils ont l’impression que s’ils attendent un mois ou deux avant la saison des ventes, ils seront en mesure d’obtenir des stocks. »

Cela a également une incidence sur les consommateurs. « Les clients sont beaucoup plus hésitants compte tenu de la situation des taux d’intérêt, a déclaré M. Thomas-Martin. De plus, ils savent que les rabais commencent à revenir. Les clients sont prêts à attendre une bonne affaire. Ils savent qu’ils ont un certain pouvoir et je crois qu’ils l’utilisent. »

Comme M. Thomas-Martin l’a souligné, étant donné que leurs produits sont conçus pour un mode de vie extérieur, le secteur des VR a tout intérêt à protéger l’environnement. C’est pourquoi l’accent est mis de plus en plus sur l’électrification.

Il a mentionné deux véhicules conceptuels récents comme autant d’indications de la direction que prend le secteur : L’eRV-2 de Winnebago, un VR entièrement alimenté par batterie, et le Vision Vehicle de Thor, qui combine un bloc-batterie et un prolongateur d’autonomie à pile à combustible intégré qui pourrait s’adapter au gaz de pétrole liquide, au gaz naturel ou à l’hydrogène.

« Il y a encore du chemin à faire, car nous devons améliorer la technologie, dit-il. Le simple fait qu’ils travaillent là-dessus maintenant et qu’ils ont fait tant de progrès est, selon moi, un signe très positif que le secteur est tourné vers l’avenir. »