Le secteur de l’automobile a fait face à de nombreux défis au cours des dernières années, notamment la pandémie de COVID-19, des pénuries de composants clés et une incertitude macroéconomique. C’est pourquoi il est maintenant plus important que jamais que les concessionnaires se concentrent sur les services après-vente afin d’assurer la fidélisation de la clientèle et de faire croître et de maintenir une source de revenus diversifiée tout en améliorant la rentabilité.


J’ai récemment animé une discussion sur ces défis et sur la façon dont les concessionnaires peuvent les surmonter. Les personnes qui ont pris part à la discussion sont :


  • Erik Johnson, économiste à BMO, qui nous a présenté les conditions économiques actuelles du secteur de l’automobile et nous a donné un aperçu de ce à quoi nous pouvons nous attendre en 2023;

  • Wolfgang Koehler et Andy Campbell, conseillers, Service après-vente au sein de Firing On All Cylinders Automotive Consulting, qui ont présenté des questions et des points de vue suscitant la réflexion au sujet du service après-vente.


Le texte qui suit constitue un résumé de la discussion.


Le point sur le secteur et l’économie


En examinant les ventes d’automobiles au cours des trois dernières années, M. Johnson a fait remarquer que les volumes ont « stagné presque à des niveaux de récession ». La pandémie de COVID-19 et les problèmes de chaîne d’approvisionnement qui en ont découlé, ainsi que la pénurie de semi-conducteurs, ont contribué au fait que l’offre de véhicules disponibles est limitée. Étant donné que les ventes de biens durables souffrent habituellement pendant un ralentissement économique, on s’attend à ce que les ventes d’automobiles demeurent difficiles. Et comme M. Johnson l’a fait remarquer, la période a été turbulente pour les économies canadienne et américaine, en raison des très fortes hausses de taux d’intérêt, de la volatilité des marchés de l’énergie et des produits de base et des taux d’inflation inégalés depuis des décennies.


Selon M. Johnson, en raison de la demande refoulée au cours des dernières années, il y a lieu d’être optimiste à l’égard des perspectives à court terme. « En 2023, nous n’assisterons certainement pas à un retour à la normale par rapport aux volumes d’avant la COVID-19, mais la situation sera probablement meilleure que ce que nous avons vu en 2022, a-t-il dit. Pour ce qui est de 2024, nous sommes optimistes quant à la possibilité que le marché revienne à des volumes qui ressemblent un peu plus à ceux d’avant la pandémie. »


Il reste toutefois d’importantes lacunes à combler en matière d’approvisionnement. Bien que la production d’automobiles au cours du mois d’octobre au Canada et aux États-Unis ait été supérieure aux niveaux d’avant la pandémie, elle était toujours en baisse de 11 % depuis le début de l’année par rapport à 2019. « Si l’on ajoute que la demande est assez refoulée, la production a encore beaucoup de chemin à faire pour répondre aux besoins permettant à l’offre et à la demande d’être équilibrées », a déclaré M. Johnson.


M. Johnson a fait quelques mises en garde à ce sujet. Les ventes de parcs automobiles qui ont été perdues pendant la pandémie ne se rétabliront probablement pas. De plus, les hausses importantes de taux d’intérêt seront prises en compte dans les décisions des consommateurs concernant les achats importants, comme les voitures.


« Si l’on tient compte de ces deux facteurs, la demande refoulée au Canada jusqu’en novembre est toujours d’environ 600 000 unités, et elle est d’environ 2,5 millions d’unités aux États-Unis, a déclaré M. Johnson. Au Canada, cela représente généralement environ cinq mois de ventes désaisonnalisées; aux États-Unis, c’est un peu plus de deux mois. Non seulement l’offre doit rebondir plus que la normale, mais elle doit augmenter suffisamment pour combler l’écart, et c’est l’une des raisons pour lesquelles il est probable que le secteur continue de bien se porter du point de vue des marges. »


Un autre aspect positif de la demande refoulée provoquée par la pandémie est que le secteur a maintenant une meilleure compréhension des tendances de la demande. « Je crois que le modèle de file d’attente sera présent encore un peu, a déclaré M. Johnson. Les constructeurs automobiles aiment beaucoup le fait d’avoir une assez bonne idée de l’ampleur de la demande. »


En ce qui concerne le marché des véhicules d’occasion, M. Johnson a déclaré que nous étions « bien avancés dans la correction ». Comme les parcs n’ont pas acheté et recyclé de nouveaux véhicules depuis la pandémie, l’offre n’a pas pu répondre à la demande sur le marché. Le marché d’occasion est au sommet de ce que Johnson a appelé un « choc de la capacité financière », qui ne devrait pas s’améliorer avant que les taux d’intérêt recommencent à baisser. « Si vous étiez un concessionnaire qui faisait des tonnes de profits sur le marché des véhicules d’occasion, vous devriez certainement être beaucoup plus préoccupés par les perspectives pour 2023 et 2024 », a déclaré M. Johnson.


Amélioration de la productivité du service après-vente


Compte tenu des grandes incertitudes économiques et sectorielles, la maximisation de la productivité sera essentielle à la réussite des concessionnaires. Dans cette optique, MM. Koehler et Campbell ont discuté des façons d’améliorer l’optimisation des aires de service et du modèle après-vente qui profite tant aux concessionnaires qu’aux employés.


Bien que la productivité soit toujours l’un des principaux indicateurs de rendement, M. Koehler a énuméré quelques questions que les concessionnaires devraient se poser, notamment :


  • Votre directeur de service sait-il comment calculer et améliorer la productivité?

  • Quelle est l’efficacité de votre atelier et qui en est responsable?

  • Quel est votre classement à l’échelle nationale par rapport à l’indice de satisfaction de la clientèle?

  • Quel est votre plan relatif aux rendez-vous et aux horaires? Prenez-vous les rendez-vous en fonction du nombre d’heures ou du nombre de rendez-vous?

  • Combien de jours vous durent vos stocks de pièces de rechange?

  • Votre commerce de détail est-il un centre de dépenses ou un centre de profit?

  • Vendez-vous beaucoup de pneus?


M. Campbell a expliqué que les techniciens de service font don de leur temps aux concessionnaires et que ceux-ci doivent comprendre comment améliorer l’utilisation de ce temps. Il a donné l’exemple d’un concessionnaire dont la productivité était de 72 %, ce qui signifie qu’au cours d’un quart de travail de huit heures, les techniciens travaillaient sur des voitures 5,76 heures par jour. Cette perte de 2,24 heures par jour pour sept techniciens totalise 15,68 heures perdues.


« Ces 15,68 heures indiquaient que j’avais deux techniciens en surplus dans mes quatre murs, a déclaré M. Campbell. Du point de vue de l’argent, le taux de ce concessionnaire en particulier était de 139 $ par l’heure, ce qui équivaut à une perte de 2 179 $ en ventes [par jour]. En multipliant ce nombre par 21 jours ouvrables, puis par 12 mois, on arrive à une perte de 549 000 $. »


M. Campbell a ajouté que si l’on tient compte du ratio pièces de rechange / main-d’œuvre de 1,1 du concessionnaire, la perte équivaut à 1,15 million de dollars. Il a reconnu que même si une productivité de 100 % n’est pas atteignable, une augmentation de celle-ci de 10 % pourrait procurer des avantages importants. Dans le cas de ce concessionnaire, passer d’un taux de productivité de 72 % à 82 % générerait 411 000 $ de ventes supplémentaires. « Lorsque nous recherchons activement des techniciens, il arrive parfois qu’ils travaillent déjà dans nos propres services, a déclaré M. Campbell. Nous ne maximisons tout simplement pas ce que nos techniciens nous offrent chaque jour. »


Où pouvez-vous commencer à améliorer la productivité? M. Koehler affirme que cela commence par la planification des rendez-vous. « Vous pouvez perdre le jeu du service immédiatement, avant même que le jeu commence, et ce, à cause des rendez-vous, a-t-il dit. À quelle heure vos techniciens commencent-ils à travailler? Combien de temps faut-il pour que la première réparation commence à l’atelier? Le technicien reste-t-il les bras croisés pendant 15 ou 20 minutes? »


Il s’agit également d’être prêt pour le client, notamment en sachant que vous aurez des pièces en stock à l’arrivée du client et en effectuant une inspection du véhicule. « Beaucoup de clients qui font une inspection avec leur conseiller commencent à se souvenir de choses qu’ils ont oublié de mentionner en prenant rendez-vous, ce qui ajoute des lignes à l’ordre de travail et tient nos techniciens occupés », a déclaré M. Koehler.


M. Campbell a souligné que l’atteinte d’une productivité maximale fonctionne mieux lorsque les techniciens eux-mêmes font partie du processus, plutôt que d’imposer une décision qui vient d’en haut. « Lorsque tout le monde participe à l’élaboration du plan de bataille, personne n’a tendance à s’y opposer, a déclaré M. Campbell. Les gens restent mobilisés parce qu’ils sont responsables de la façon dont l’entreprise fonctionnera. Tout cela vient du fait que vos employés bâtissent vos processus. S’ils sont responsables de l’élaboration des processus, cela contribue à maintenir leur mobilisation. »


Pour écouter toute la discussion, regardez notre enregistrement vidéo (disponible en anglais seulement).