L’élevage est l’une des utilisations des terres les moins dommageables sur le plan écologique, mais une mauvaise gestion des ranchs peut tout de même avoir des répercussions négatives sur l’environnement. L’élevage est une activité qui peut également engendrer des difficultés sur le plan financier, mais de bonnes pratiques de gérance permettent de grandement les atténuer.
Western Ranchlands a relevé le défi d’être une société d’investissement agricole et de gestion des terres qui met l’accent sur la rentabilité et la durabilité environnementale.
J’ai récemment rencontré M. Sheldon Atwood, chef de la direction et président de Western Ranchlands, pour discuter de la façon dont l’entreprise incarne sa devise « Doing Good, While Doing Well ». Comme M. Atwood l’a dit : « Notre vision est de créer un modèle d’affaires qui perpétue la conservation et la préservation de vastes paysages, mais qui le fait d’une manière très solide sur le plan financier et économiquement viable. »
Voici un résumé de notre discussion.
Christine Cooper : Vous avez dit que les activités d’élevage se fragmentent souvent lorsque l’entreprise est transmise d’une génération à l’autre. Cela entraîne une fragmentation des terres et, au bout du compte, la dissolution de l’entreprise elle-même. Quelles sont les répercussions les plus importantes?
Sheldon Atwood : La fragmentation entraîne la perte d’économies d’échelle du point de vue des affaires, ainsi que la perte de contiguïté environnementale. L’utilisation des terres se trouve alors sur une pente glissante vers une catastrophe écologique, et moins de personnes prêtent attention à la santé des terres ou sont en mesure de les gérer efficacement.
Christine Cooper : La durabilité est au cœur de la philosophie de Western Ranchlands. Vous avez décrit l’idée répandue selon laquelle les bénéfices et la durabilité sont incompatibles dans le secteur de l’élevage comme étant une « erreur fondamentale ». Pourriez-vous nous expliquer pourquoi?
Sheldon Atwood : La santé économique à long terme et la richesse à long terme qui sont générées par un organisme vivant – la terre – sont directement liées l’une à l’autre. Par conséquent, toute détérioration de la santé écologique des terres à long terme nuit aux avantages financiers à long terme de ce même actif.
Christine Cooper : Pouvez-vous nous parler de la façon dont la gestion d’activités plus durables a revitalisé les terres?
Sheldon Atwood : Il y a de nombreux exemples. Par exemple, certaines zones du ranch dans lesquelles le pâturage était historiquement interdit et qui ont été protégées contre les incendies pendant une centaine d’années sont devenues très denses, très épaisses, avec des arbres de très petit diamètre. Nos partenaires axés sur la conservation ont effectué un certain nombre d’évaluations biologiques à l’échelle de la propriété, et l’une de leurs conclusions a révélé que le centre de ces zones boisées trop denses était essentiellement un désert biologique. Les arbres ne poussaient plus, ce qui limitait leur capacité à éliminer du carbone de l’atmosphère. Relativement parlant, il n’y avait pratiquement aucun animal sauvage vivant bien au-delà des limites extérieures.
Nous avons travaillé en étroite collaboration avec chacun de ces partenaires pour élaborer un plan écologique favorisant une diversité de structures et d’organisation de l’espace dans ce bois. Ainsi, des zones ouvertes sont adjacentes à des zones encore boisées, et la migration naturelle de la faune sauvage dans ces zones périphériques est favorisée. Ces zones périphériques deviennent des zones de protection pour la faune, mais elles sont aussi juxtaposées à une source de nourriture pour cette faune. Ainsi, le quotient de biodiversité dans ces zones grimpe considérablement. De plus, la répartition de l’espace réduit la menace des feux de forêt.
Christine Cooper : Bien entendu, vous ne pouvez parler de réussite que si vous pouvez la mesurer. Comment Western Ranchlands mesure-t-elle la réussite financière de ses efforts?
Sheldon Atwood : Je réduis mes coûts d’alimentation hivernale en améliorant la qualité de la terre et sa capacité à produire plus d’herbe ou à la garder plus verte jusqu’à la fin de l’année, car je dispose de fourrage vert plus longtemps. Cela augmente également mon chiffre d’affaires en me permettant d’avoir plus d’animaux sur un fond de terre donné, car je dispose désormais de plus de fourrage.
Nous pouvons mesurer la quantité de fourrage que nous récoltons, ce qui prouve que nous pouvons améliorer la capacité de charge et réduire le coût des terrains par unité de production, ou augmenter le taux de rendement par unité d’investissement.
Par ailleurs, nous utilisons le bétail comme un outil permettant de modifier la végétation et de distribuer les nutriments. Pour améliorer notre capacité à le faire, nous avons relié un certain nombre de puits d’eau à un pipeline qui a la capacité d’acheminer toute l’eau en un seul endroit, partout dans le ranch et en tout temps. Cela nous permet de rassembler de grands troupeaux. Ils se rendent sur une parcelle de terrain précise et broutent l’herbe de manière plus régulière et plus uniforme. Ils ne restent pas dehors pendant de longues périodes pour créer des sentiers et altérer le paysage. Quand ils ont terminé, ils s’en vont. Cela laisse plus de temps à ces plantes pour récupérer. Ainsi, la broussaille est moins présente et les plantes nutritives dont le bétail a besoin sont de plus en plus nombreuses.
Par ailleurs, les coûts de la main-d’œuvre sont nettement moins élevés lorsqu’il y a moins de grands troupeaux que lorsqu’il y a plus d’animaux répartis sur de plus grandes surfaces pendant de plus longues périodes. Cela crée également d’autres types d’occasions pour les autres espèces et groupes d’intérêt. Étant donné la manière dont nous gérons les choses, le bétail se trouve rarement sur plus de 5 % de la surface du ranch à la fois. Il reste donc 95 % de la surface disponible en tout temps pour la faune et les habitants.
Christine Cooper : Compte tenu du succès que vous avez rencontré et de l’évolution du ranch, qu’est-ce qui vous enthousiasme le plus pour l’avenir?
Sheldon Atwood : Les gens viennent de partout dans le monde et voient ce que ce modèle pourrait signifier, non seulement pour leur terre, mais aussi pour le monde entier. Ils peuvent constater par eux-mêmes que nous pouvons transformer complètement les terres cultivables marginales et les terres d’élevage mal gérées ou dégradées au moyen de ce modèle régénératif. En agissant ainsi, nous pouvons éliminer complètement l’empreinte carbone négative de l’ensemble de notre société tout en produisant des aliments sains, en maintenant les espaces ouverts, en améliorant la biodiversité et en générant des rendements positifs. En d’autres mots, sans demander de l’aide ni compter sur la réglementation, nous changeons la donne en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Cela est encourageant pour tous ceux qui croient aux changements climatiques et aux effets de l’activité humaine.
L’entrevue avec Sheldon Atwood de Western Ranchlands a donné lieu à une discussion intéressante sur son engagement à gérer une entreprise plus soucieuse de la conservation, à la fois rentable et durable sur le plan environnemental. Écoutez l’entretien complet ici.
